IDM rencontre: la Garderie Ponpon Daycare




L'entreprenariat est une option viable pour les nouveaux arrivants dans un pays, quant il s'agit de trouver un emploi. S'ils n'ont pas été formés dans le pays d'accueil, leurs acquis académiques sont difficilement reconnus et ils doivent bien souvent se reconvertir dans des professions différentes de celles pour lesquelles ils s'étaient formé. IDM a choisi de jeter un regard particulier à cette solution à l'emploi.

La garderie Ponpon est une entreprise privée qui fascine de par sa taille (80 places) et de par l'ambition de ses propriétaires. En général, les services de ce genre sont offerts au privé par des familles qui, c'est la loi, peuvent garder chez elles 6 ou 7 enfants tout au plus. L'industrie est également majoritairement dominée par les femmes. Pour les soeurs Kenny Joyce et Tamara Calci, l'opportunité s'est présentée sous forme de besoin pour l'une et de capacité pour l'autre. Elles ont vu plus grand en se lançant en affaires et décidé d'offrir des services à un plus grand nombre d'enfants en mettant l'emphase sur une meilleure qualité pour rentabiliser l'affaire.

Combinant le sens des affaires-justement- et l'expérience de la première avec les connaissances techniques de la deuxième, elles ont créé la Garderie Ponpon Daycare en 2011 à Aylmer, une des villes qui forme la grande ville de Gatineau, en Outaouais, dans la Région de la capitale nationale du Canada.

Bien que cette région qui fait frontière entre le Québec et l'Ontario favorise l'entreprenariat, le projet a mis trois ans à se concrétiser. C'est que les services à la petite enfance sont très règlementés au Canada et au Québec en particulier. Il faut s'armer de patience et persévérer et... ne pas être seul pour franchir toutes les étapes du lancement d'un tel projet. Outre le désir et la passion pour ce type d'entreprise, c'est justement un système de soutien et un réseau solides qui ont permis à Kenny et à Tamara de réussir. Ce sont d'ailleurs là, au-delà de l'opportunité, les ingrédients principaux qu'elles recommandent pour le succès de toute entreprise: la passion et un système de soutien sans faille.


D'Abidjan à Aylmer


Contribution spéciale de Fatymah

Fatymah est arrivée en Outaouais au Québec en janvier 2012 avec son mari et ses deux garçons. Dans cette lettre adressée à une amie qui vit dans son pays d'origine, Fatymah décrit une partie de son quotidien et parle des défis liés à l'intégration et à l'éducation des enfants dans une famille immigrante.


Ma très chère amie,

J'ai passé une agréable journée qui pourtant, se termine sur une note de tristesse. J'ai dit au revoir, ou plutôt adieu, à certaines personnes avec lesquelles j'ai passé de bons moments et que je ne reverrai plus.

Ma journée a commencé avec la dernière activité de la « classe des Chevaux », l'année scolaire s'achève la semaine prochaine. J'assistais mon cher Pierre-Yves, qui est la vedette de sa classe pour la semaine. Je me suis rendue compte que ses amis ont tous grandi, qu’ils suivent tous bien les consignes de la prof et que mon fils a trouvé sa place dans ce groupe. J'ai assisté à un exercice de préparation à la classe suivante, la première année. Eh oui! Les enfants ne sont plus des « bébés lala ».



C’est couchés sur le sol qu’ils ont fait l’exercice de l'écriture, pour muscler leurs dos, ce qui n’a rien à voir avec le « b-a-ba » de notre temps. Chaque élève devait dessiner les passagers d'un train selon les consignes lues par la maitresse. Pour les bavards comme Pierre-Yves, pas de pieds au mur, pas de « va au coin », mais plutôt des minutes d'atelier perdues. Les pauvres avaient l’air tout tristes de regarder leurs amis jouer en attendant leur tour.

C’est à contrecoeur que j'ai dû les quitter pour me rendre au party (1) du Centre action bénévole d'Aylmer qui met fin aux activités de l'année. De mars à juin, J'ai fait du bénévolat 5h par semaine auprès des personnes âgées. Autre lieu, autre décor. Retrouvailles chaleureuses avec mes collègues bénévoles dont une mauritanienne à l'accent ivoirien et une béninoise nouvellement rencontrée. Les pièces ont été décorées pour l'occasion, nous (bénévoles et personnel du centre) avons accueilli les membres dans la bonne humeur. Beaucoup d'absents, je crois que tout le monde n'aime pas les au revoir. Au menu, diner (2) santé: sandwich, légumes crus et trempette. Après le dessert, un groupe musical s'installe et le show qui va durer deux heures commence. Les membres du centre reprennent les refrains et rejoignent la piste de danse malgré leurs bobos. C'est beau de les voir revivre leur jeunesse à travers ces chansons.

Même les bonnes choses ont une fin, il faut ranger et se séparer. Les plus chanceux ont reçu des cadeaux des amis, et on se donne rendez-vous en septembre pour la reprise des activités. Merci à ce centre qui m'a offert ma première expérience de travail québécoise car faire du bénévolat et s'impliquer dans sa communauté apporte un plus au curriculum vitae.


Après huit mois jour pour jour, je rends grâce à Dieu de cette adaptation et de cette intégration qu'Il a facilitée, à commencer par la douceur de notre premier hiver. Oui, le Canada est un pays qui offre des opportunités aux nouveaux arrivants. Il faut cependant rester à l’affût des bonnes informations, se rendre dans les organismes appropriés, aller vers les autres, accepter de commencer au bas de l'échelle. Peu importe, une première expérience de travail de trois mois dans un centre d’appel jouera sûrement en ta faveur lors de la présélection pour un poste dans ton domaine. L'ambiance de travail dépend de l'entreprise. Dans mon cas, elle est plutôt très professionnelle, avec peu de familiarité. Le boulot c'est le boulot, l'heure c'est l'heure. J'ai été estomaquée d'entendre un collègue refuser du boulot de la « Sup’ » parce qu'il devait rentrer chez lui à 16h30.

Ici, nous reconstruisons notre réseau social. Nous avons rencontré deux familles sympa que nous fréquentons régulièrement: une ivoirienne et une afro-canadienne (ils sont super sympa). C'est le fun de voir les enfants s'amuser et la dernière sortie à « Tubes et jujubes » a même permis aux parents d'essayer des glissades!

Les garçons ont bien grandi, Pierre-Yves parle québécois et Kyle affirme sa personnalité (refus d'obéir, volonté de faire certaines choses lui même, refus d'être « le plus petit »...). Ils ont mieux survécu au changement de mode de vie que leurs parents même si l'heure d'aller au lit pose toujours problème. Malgré les injonctions des parents, ils résistent jusqu'à épuisement et pleurent quelques heures plus tard, au réveil.

Du lundi au vendredi, c'est le rush au réveil afin que tout le monde soit à l'heure au boulot, à l'école et à la garderie. Le soir, tout (souper (2), douche, lecture de mails) se passe au pas de course pour se coucher tôt. Nous n'avons pas encore réussi à ajouter des activités artistiques ou sportives en semaine comme les canadiens. Le week-end, c’est ménage, lessive et épicerie, sorties au parc ou visites aux amis lorsque les parents ne sont pas trop fatigués. C'est épuisant de bosser et s'occuper des enfants et de la maison en même temps. Pas de « Awa », de « Mariam » ou de « Célestine » pour déléguer les tâches ménagères et tu peux être sure que tout est fait comme tu veux. À Ottawa, j'ai découvert un magasin de produits tropicaux aux odeurs du marché gouro de chez nous. Je me suis rendue compte que ça coûte un peu de retrouver les saveurs de son pays.

 
Il reste encore beaucoup de choses à découvrir, à apprendre, à apprécier, à s'approprier. Je te remercie pour ton soutien et tes prières.
Que Dieu veille sur nous.

P.S.: Peu importe la couleur de la peau, les hommes sont pareils. Les canadiens commettent des infractions routières, certains canadiens sont très « affairés » (ils appellent ça la curiosité) et, si j’ai bien compris l’actualité rce les politiciens empêchent les employés d'exercer leur droit de grève.

P.P.S. : Certains termes vont te sembler nouveaux. (1) Party = fête (2) petit-déjeuner, déjeuner et diner sont appelés ici déjeuner, diner et souper.