Gone too soon

Michael JacksonMichael Jackson via last.fm

Comment en parler? Les médias semblent avoir fait le tour de la question. Moi, je m'enivre encore de sa musique et j'esquisse quelques pas de danse quand, en fin de journée, je me dirige vers mon stationnement. J'ai même commandé quelques disques et des vidéos afin de compléter ma collection. Michael Jackson est décédé.

Comme le reste de la planète -du moins celle qui est "branchée"- j'ai appris la nouvelle à peine une heure après son décès. Un, puis deux messages-texte ont confirmé l'incroyable en un rien de temps. Rien à dire, nous évoluons désormais dans un univers complètement digital. Une "onde de choc planétaire", ont annoncé les médias, puis ils ont passé à la météo et à leurs programmes du jour. Moi j'étais tétanisé, abasourdi: on ne meurt pas à cinquante ans, pas quand on est plus qu'une star, une méga-star, et même si on a connu des déboires juridiques et des problèmes financiers.

Imaginaire d'enfant

Je me suis demandé pourquoi cette nouvelle avait été un tel choc pour moi. Bien sûr, il y a de la star planétaire, l'icône qui a révolutionné les films musicaux, le "Roi" de la pop, le Moonwalker qui nous a tous fait rêver. Mais il y a plus. C'est un peu comme si tout un pan de mon enfance et de mon adolescence s'effondre d'un coup, sans que je n'aie vu venir.

Je me suis alors souvenu qu'"M-Jay" comme je l'appelle, est le personnage central de mon premier film d'horreur: Thriller. J'avais six ou sept ans à peine. Je me souviens encore de ma stupeur et j'ai un plus clair souvenir de mes cauchemars que des pas de danse d'M-Jay: j'étais aussi tétanisé qu'Ola Ray l'héroïne du film. Bien que je l'aie revu aussi souvent que l'ont permis mes grands cousins à l'époque, je n'ai appris à l'apprécier que dix ou douze ans plus tard.

M-Jay, c'est aussi "jas-pee-rit! pee-rit! pee-rit! pee-rit!", ma version personnelle des paroles de Just beat it du temps où je ne comprenais pas un mot d'anglais. Nous apprenions, mes frères, mes amis et moi à danser sur des airs de musique sans en comprendre les paroles (nous continuons d'ailleurs entre le Dombolo et autres musiques africaines.) Ce n'est qu'adolescent que j'ai retrouvé les paroles et compris le sens de la chanson: "fout le camp!" À quatorze ans, j'ai aussi appris que "Bad" ne voulais pas dire "mauvais", mais "cool." J'ai découvert Off the Wall, les Jackson 5, Diana Ross, "Ben", "I'll Be There" et "ABC", le caisson d'oxygène, les chirurgies esthétiques, les tigres, le ranch, le changement de couleur et rencontré Souad, encore plus fan d'M-Jay que moi.

Puis il y a eu Dangerous, l'explosion: en un temps record, mes frères, mes amis et moi qui comprenions maintenant l'anglais, avons appris les paroles de "Heal the World" mais aussi de "Keep the Faith" et de "Remember the time" que nous utilisions dans nos premières correspondances amoureuses. J'étais fou de basketball: il y a eu Jam dont j'ai dû voir les images avec Michael Jordan un million de fois. MJ et MJ, mes idoles, étaient réunies pour la première fois. J'adorais danser et très vite j'ai appris à esquisser ses pas les plus simples avec mon cousin Bibs. Je travaille encore sur mon Moonwalk...

C'est le clip de Black or White qui illustre le mieux à mes yeux l'impact mondial d'M-Jay. Il y est tour à tour accompagné de danseurs traditionnels Masaï dans la savane est-africaine, de danseuses thailandaises, de danseurs autochtones au coeur de l'Amérique du nord, d'une danseuse indienne dans les rues d'une ville, et d'un groupe de danseurs russes en plein hiver. Par la musique et par la danse, Michael semble avoir "uni" le monde, comme l'indiquent les paroles de cette chanson où il cherche à faire exploser les barrières raciales, "If you're thinking of being my brother it don't matter if you're black or white", et comme on peut le voir par l'impact mondial de l'annonce de son décès. Il a su faire rêver riches et pauvres sur tous les continents.

Solitudes

M-Jay essayait aussi de répondre aux incessantes questions sur ses changements physiques. Comme il l'a fait dans Why you wanna trip on me sur le même album, il réclamait qu'on le laisse tranquille. "The great tragedy of his life is that Michael was not permitted to be the simple, humble man that at heart he always was. Instead, he was driven to stardom at ten years old by an ambitious father, and dogged by controversy all his life. I believe the media must take much of the blame for his slow destruction and eventual death: with his sanity buffeted and his health wracked by the global bullying, it is incredible to me that Michael stayed as normal as he was." dit son ami Uri Geller. Imaginez la pression d'être M-Jay et de devoir être à la hauteur des attentes des fans, des journalistes et des critiques. Michael s'est même peu à peu isolé de sa famille devenue trop exigeante en faveurs de toutes sortes et s'est cantonné à un monde de rêves et de solitudes.

"Sans avoir réellement choisi cette voie, Michael s’est néanmoins révélé comme un artiste complet : chanteur, auteur, compositeur, danseur, chorégraphe... Au fil de l’évolution de sa carrière sa silhouette aussi s’est transformée, révélant une part de grande fragilité de l’artiste" indique un article sur le site web d'RFI. Michael a été, comble du paradoxe, trahi par sa relation avec ceux qu'il a le plus chéri: les enfants. "With a child's heart / Nothing's gonna get me down" chantait-il, enfant. Il aura fallu les (fausses) accusations d'un enfant pour tâcher sa réputation et changer le cours de sa vie. Entre la honte, la confusion, les mauvaises décisions (offrir une compensation plutôt que d'aller en cour), le déclin de sa carrière musicale, il n'en reviendra jamais.

Ses dernières heures de répétition témoignent cependant de son impatience à remonter sur la scène: il se préparait ardemment. Dansons alors au rythme de ces airs si célèbres et vivons les paroles du titre qui a lancé sa carrière solo, Off the Wall!

"So tonight gotta leave that nine to five upon the shelf
And just enjoy yourself
Groove, let the madness in the music get to you
Life aint so bad at all
If you live it off the wall
Life aint so bad at all (live life off the wall)"

So long, Michael, and thanks for the rythms, the dance and the dream!

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